Pour combien d’heures de préparation ?
Actuellement, notre société de consommation valorise le « tout – tout
de suite », ce qui est totalement incompatible avec toute activité
artistique, entre autres.
C’est l’un des problèmes majeurs des artistes actuellement (cf
l’article sur le phénomène « star – académy ») et nos enfants «
apprentis – artistes » savent que la qualité ne peut venir qu’avec le
travail.
Pour un musicien, combien d’heures de répétitions pour bien interpréter
un morceau de quelques minutes ?
Le souci est le même pour un sportif : combien d’heures d’entraînement
pour quelques secondes de course ou de compétition ?
Le travail de fond, que l’on ne voit pas, dont on ne se rend pas
forcément compte, est indispensable.
- Chez l’enfant, en phase d’apprentissage, il va grandement aider
à développer des capacités indispensables à son développement
harmonieux, pour qu’il devienne un adulte responsable et
équilibré sens de l’effort, de la rigueur, acceptation d’une
discipline
« intelligente », du respect des autres, éveil de la sensibilité
artistique, de la curiosité intellectuelle…tout un programme
d’éducation !
- Pour l’adulte professionnel, on doit absolument considérer que
toutes ces heures passées dans l’ombre constituent un travail de
recherche, de préparation, d’entraînement, de répétition … en vue d’une
réalisation future. Nier ce temps passé en assimilant un artiste qui
n’est pas sur scène à un « chômeur » me semble une grave dérive
pour l’avenir qualitatif de nos représentations culturelles (cf
problèmes de l’intermittence) …
La rentabilité n’est décidément pas compatible avec l’art, ni avec
l’éducation, entre autres !
La réalisation, c’est la phase finale, ce que le public va voir,
écouter, aimer ou ne pas aimer, ce que la critique va juger. C’est ce
qui est éphémère dans le cas du spectacle vivant, mais qui nous laisse
des impressions indélébiles…
Il faut apprendre à considérer le travail qui a été effectué pour
arriver à la prestation finale.
Il est vrai que des outils techniques très performants permettent
parfois, et de plus en plus souvent, de « tricher » : par exemple,
représentation d’un chanteur ou même d’un orchestre au complet en «
play – back », sans que le public en soit averti ; la qualité va être
là, même si le chanteur chante faux ou si les musiciens ne connaissent
pas les partitions, mais où sont la communion, l’échange avec
l’artiste ? Qui doit – on applaudir ? Ce sont les techniciens qui ont
réalisé le spectacle, les soi – disant artistes n’étant que des
figurants… Avec l’ère du « virtuel », ils pourront bientôt carrément
rester chez eux…
Les avancées technologiques permettent heureusement une création autre,
très riche et diversifiée, mais le public ne doit pas accepter d’être
leurré.
En tant que parents de musiciens, vous savez qu’on ne peut pas tricher
avec le véritable travail de préparation, et que pour offrir
« huit minutes de spectacle » complet – piano, percussions, mime,
danse, chant – vos enfants et les jeunes artistes qui les encadreront
vont travailler de nombreuses heures auparavant. La composition de la
musique, l’élaboration du texte, l’ébauche de mise en scène ont déjà
occasionné quelques heures de labeur … !
C’est le dur « métier d’artiste », qui donne heureusement de nombreuses
satisfactions, à condition qu’il soit considéré avec le respect qu’il
mérite.
C’est à nous tous d’œuvrer dans ce sens .
Brigitte Pras - novembre 2004
A l'occasion de la réalisation du "Voyage
Sans Fin" à l'auditorium Maurice Ravel de Lyon en mai 2005
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